Au tournant du XIXe siècle, à un moment où la peinture et la sculpture avaient déjà accompli leurs propres révolutions, toute une jeune génération d'artistes-artisans s'employa en Belgique à brouiller les frontières entre les beaux-arts et les arts appliqués, entre les «arts majeurs» et les «arts mineurs».
Leur objectif était aussi simple qu'ambitieux: amener des disciplines comme l'ébénisterie, la verrerie, la ferronnerie ou encore la céramique à se libérer du carcan des styles du passé en vue d'embrasser une esthétique nouvelle, et ainsi créer des objets aussi beaux qu'adaptés aux besoins intellectuels et matériels de l'époque. Le succès fut rapidement au rendez-vous pour ces rénovateurs de l'art décoratif, en Belgique comme à l'étranger, mais la chute fut d'autant plus brutale.
Au fil du XXe siècle, la plupart d'entre eux tombèrent dans l'oubli et bon nombre de leurs créations, devenues obscures, furent éparpillées, égarées ou tout simplement détruites. À l'inverse de l'architecture, qui a fait l'objet de très nombreuses publications, les arts appliqués demeurent aujourd'hui encore largement méconnus pour la période de l'Art nouveau en Belgique. C'est pourquoi les Éditions du Musée Horta ont lancé à partir de la collection privée de Jonathan Mangelinckx une série de quatre ouvrages collectifs, voulus comme autant de chaînons manquants au niveau scientifique.
Réalisé sous la coordination de Françoise Aubry, Borys Delobbe et Jonathan Mangelinckx, ce premier tome, préfacé par Paul Greenhalgh, prend pour pivot Victor Horta afin de redécouvrir le parcours et les créations de quatre autres figures de l'Art nouveau belge : Fernand Dubois, Paul Du Bois, Léon Ledru et Georges Hobé. Au fil des contributions de Françoise Aubry, Églantine Lebacq, Anne Pluymaekers et Raymond Balau, c'est tout un pan relativement méconnu de ce phénomène précurseur du design qui, au XXIe siècle, accède enfin à une nouvelle visibilité.